Avec le P.L.M.
RUBRIQUE : Le rail
Si l’on abandonne définitivement une liaison ferroviaire entre la France et l’Italie, l’on se tourne, en revanche, vers une autre liaison internationale, franco-suisse, cette fois. Le tronçon Cluses-Le Fayet est déclaré d’utilité publique en 1891 pour une voie normale, tandis que la voie métrique le Fayet-Barberine est décidée officiellement en 1894 et attribuée à la Compagnie P.L.M.
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La voie ferrée grimpe plusieurs rampes dont celle de Vaudagne
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La voie ferrée du côté de Vaudagne
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L’usine électrique du Châtelard
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La gare des Houches en construction
À cette date, on n’a pas encore déterminé le mode de traction et la convention spécifie seulement que « la traction serait effectuée soit par câbles, soit par des machines actionnées par la vapeur, l’eau ou l’électricité ». En effet, du côté de Martigny s’élabore un projet de chemin de fer entre la capitale du Valais et le hameau du Châtelard, frontière française. L’intérêt touristique de cette ligne n’est pas à démontrer, et les Suisses, en matière d’équipements touristiques (rail ou câble) ont fait leurs preuves ! Or, les différentes études établies par les sociétés suisses, proposent des tracés différents mais sont unanimes quant à l’usage de la voie métrique et de la crémaillère. Du côté français, on adhérera d’autant plus facilement à ces projets qu’un consensus technique rendra possible la jonction entre les deux réseaux.
Le tronçon Cluses-Le Fayet est déclaré d’utilité publique en 1891 pour une voie normale, tandis que la voie métrique le Fayet-Barberine est décidée officiellement en 1894 et attribuée à la Compagnie P.L.M. À cette date, on n’a pas encore déterminé le mode de traction et la convention spécifie seulement que « la traction serait effectuée soit par câbles, soit par des machines actionnées par la vapeur, l’eau ou l’électricité ».
Dès lors, différentes stratégies sont proposées pour mener à bien ce nouvel équipement.
Tout d’abord le tracé est réétudié. Abandonnant définitivement le tunnel sous le Prarion, les ingénieurs optent pour un itinéraire plus simple, longeant l’Arve et épousant davantage les contours du relief.
Mais certains passages présentent de fortes pentes qu’il paraît impossible de gravir sans aide extérieure. Qu’à cela ne tienne, plutôt qu’une crémaillère, on imagine un système de traction électrique par « unités multiples ». Chaque wagon dispose de son propre « truck-moteur » qui lui permet de s’auto-tracter, grâce à un frotteur, par simple adhérence sur un troisième rail. Ce troisième rail est électrifié et fournit du courant de 600 v en continu. Par sécurité, les rampes les plus fortes seront équipées d’un rail central supplémentaire sur lequel peuvent s’agripper des freins à mâchoires en cas de problème. En 1897, l’ingénieur Auvert, responsable au P.L.M. des premiers essais de traction électrique, conclut : « Afin d’obtenir la puissance et l’adhérence nécessaires pour gravir des rampes de 90 mm/m sans l’aide de la crémaillère, les convois seraient formés de véhicules tous automoteurs, d’un poids assez élevé, commandés par un seul conducteur placé en tête, grâce à un système d’asservissement pneumatique. Les sections comportant les plus fortes déclivités seraient équipées d’un rail central de sécurité, sur lequel viendraient se serrer des pinces portées par les véhicules, de sorte à garantir un freinage satisfaisant en toutes circonstances ».
En 1896, la Compagnie P.L.M. obtient officiellement l’autorisation d’utiliser la force hydraulique de l’Arve. Les sites de Servoz et des Chavants sont choisis pour y implanter les usines motrices. La distribution du courant électrique se fera par un troisième rail, posé parallèlement à la voie, un choix que justifie le sous-directeur du P. L.M. à Paris, l’ingénieur Geoffroy : « Bien que le conducteur aérien présente certains avantages, notamment celui d’être indépendant de la voie et de ne gêner en rien le service de l’entretien, on a préféré le conducteur près du sol pour les raisons suivantes : 1° : Il est plus robuste et souffrira moins des avalanches. 2° : Il est plus facile à réparer et à débarrasser du verglas. 3° : Sur les faibles déclivités où les trains pourront marcher à 40 km/h la prise de courant au moyen de palettes frottant sur un rail sera mieux assurée qu’avec un trolley ».
Les usines de production du courant électrique font, elles aussi, l’objet d’études et de travaux scrupuleux.
Construite dans le petit vallon du Châtelard, la centrale de Servoz doit distribuer l’énergie directement à la première partie de la ligne, entre le Fayet et Servoz. Une chute d’eau préexistante de 38 mètres de hauteur, dépendant de l’usine de Chedde, est achetée partiellement par le P.L.M. pour 50 000 francs. Un barrage, près du Pont des Lanternes, en règle le débit par un système de vannes. « L’eau dérivée passait d’abord dans une chambre de décantation dont la profondeur variait de façon à conserver in fine un débit constant de 12 m3. La galerie des Gures faisait suite aux bassins de décantation. Longueur 505 m, déclivité 20 mm/m, largeur 2,5 m, hauteur 2 m pour une vitesse de 2,4 m/s et un débit de 12 m3/s. Quatre conduites forcées (diamètre 0,95 m) en acier doux de 8,50 ml de long étaient assemblées entre elles par des brides boulonnées, scellées en amont et en aval dans les murs de l’usine. Au bout de chacune d’elles, une turbine de 500 ch. »
Un peu plus en amont, la centrale des Chavants est prévue pour la deuxième partie de la ligne : Servoz-Chamonix. Dans un deuxième temps, elle alimentera également les sous-stations des Iles et du Morzay, permettant ainsi à l’ensemble de la voie ferrée d’être fournie en énergie électrique en continu. Tout près du viaduc Sainte-Marie, on construit un mini-barrage en béton armé de 3 mètres de hauteur et de 9 mètres de largeur, encastré entre la rive droite de l’Arve et le mur de prise d’eau. Un chenal de 2,50 mètres de largeur effectue, sur la rive gauche, une prise d’eau directe dans le torrent.